Vingt mille lieues sous les mers

Veinte mil leguas de viaje submarino

   IV

   Capítulo 4

   NED LAND

   Ned Land

   Le commandant Farragut était un bon marin, digne de la frégate qu'il commandait. Son navire et lui ne faisaient qu'un. Il en était l'âme. Sur la question du cétacé, aucun doute ne s'élevait dans son esprit, et il ne permettait pas que l'existence de l'animal fût discutée à son bord. Il y croyait comme certaines bonnes femmes croient au Léviathan par foi, non par raison. Le monstre existait, il en délivrerait les mers, il l'avait juré. C'était une sorte de chevalier de Rhodes, un Dieudonné de Gozon, marchant à la rencontre du serpent qui désolait son île. Ou le commandant Farragut tuerait le narwal, ou le narwal tuerait le commandant Farragut. Pas de milieu.

   El comandante Farragut era un buen marino, digno de la fragata que le había sido confiada. Su navío y él formaban una unidad, de la que él era el alma.

No permitía que la existencia del cetáceo fuera discutida a bordo, por no abrigar la menor duda sobre la misma. Creía en él como algunas buenas mujeres creen en el Leviatán, por fe, no por la razón. Estaba tan seguro de su existencia como de que libraría los mares de él. Lo había jurado. Era una especie de caballero de Rodas, un Diosdado de Gozon en busca de la serpiente que asolaba su isla. O el comandante Farragut mataba al narval o el narval mataba al comandante Farragut. Ninguna solución intermedia.

   Les officiers du bord partageaient l'opinion de leur chef. Il fallait les entendre causer, discuter, disputer, calculer les diverses chances d'une rencontre, et observer la vaste étendue de l'Océan. Plus d'un s'imposait un quart volontaire dans les barres de perroquet, qui eût maudit une telle corvée en toute autre circonstance. Tant que le soleil décrivait son arc diurne, la mâture était peuplée de matelots auxquels les planches du pont brûlaient les pieds, et qui n'y pouvaient tenir en place! Et cependant. L'Abraham-Lincoln ne tranchait pas encore de son étrave les eaux suspectes du Pacifique.

   Los oficiales de a bordo compartían la opinión de su jefe. Había que oírles hablar, discutir, disputar, calcular las posibilidades de un encuentro y verles observar la vasta extensión del océano. Más de uno se imponía una guardia voluntaria, que en otras circunstancias hubiera maldecido, en los baos del juanete. Y mientras el sol describía su arco diurno, la arboladura estaba llena de marineros, como si el puente les quemara los pies, que manifestaban la mayor impaciencia. Y eso que el Abraham Lincoln estaba todavía muy lejos de abordar las aguas sospechosas del Pacífico.

   Quant à l'équipage, il ne demandait qu'à rencontrer la licorne, à la harponner. et à la hisser à bord, à la dépecer. Il surveillait la mer avec une scrupuleuse attention. D'ailleurs, le commandant Farragut parlait d'une certaine somme de deux mille dollars, réservée à quiconque, mousse ou matelot, maître ou officier, signalerait l'animal. Je laisse à penser si les yeux s'exerçaient à bord de l'Abraham-Lincoln.

   La tripulación estaba, en efecto, impaciente por encontrar al unicornio, por arponearlo, izarlo a bordo y despedazarlo. Por eso vigilaba el mar con una escrupulosa atención. El comandante Farragut había hablado de una cierta suma de dos mil dólares que se embolsaría quien, fuese grumete o marinero, contramaestre u oficial, avistara el primero al animal. No hay que decir cómo se ejercitaban los ojos a bordo del Abraham Lincoln.

   Pour mon compte, je n'étais pas en reste avec les autres, et je ne laissais à personne ma part d'observations quotidiennes. La frégate aurait eu cent fois raison de s'appeler l'Argus. Seul entre tous, Conseil protestait par son indifférence touchant la question qui nous passionnait, et détonnait sur l'enthousiasme général du bord.

   Por mi parte, no le cedía a nadie en atención en las observaciones cotidianas. La fragata hubiera podido llamarse muy justificadamente Argos. Conseil era el único entre todos que se manifestaba indiferente a la cuestión que nos apasionaba y su actitud contrastaba con el entusiasmo general que reinaba a bordo.

   J'ai dit que le commandant Farragut avait soigneusement pourvu son navire d'appareils propres à pêcher le gigantesque cétacé. Un baleinier n'eût pas été mieux armé. Nous possédions tous les engins connus, depuis le harpon qui se lance à la main, jusqu'aux flèches barbelées des espingoles et aux balles explosibles des canardières. Sur le gaillard d'avant s'allongeait un canon perfectionné, se chargeant par la culasse, très épais de parois, très étroit d'âme, et dont le modèle doit figurer à l'Exposition universelle de 1867. Ce précieux instrument, d'origine américaine, envoyait sans se gêner, un projectile conique de quatre kilogrammes à une distance moyenne de seize kilomètres.

   Ya he dicho cómo el comandante Farragut había equipado cuidadosamente su navío, dotándolo de los medios adecuados para la pesca del gigantesco cetáceo. No hubiera ido mejor armado un ballenero. Llevábamos todos los ingenios conocidos, desde el arpón de mano hasta los proyectiles de los trabucos y las balas explosivas de los arcabuces. En el castillo se había instalado un cañón perfeccionado que se cargaba por la recámara, muy espeso de paredes y muy estrecho de ánima, cuyo modelo debe figurar en la Exposición Universal de 1867. Este magnífico instrumento, de origen americano, enviaba sin dificultad un proyectil cónico de cuatro kilos a una distancia media de dieciséis kilómetros.

   Donc, l'Abraham-Lincoln ne manquait d'aucun moyen de destruction. Mais il avait mieux encore. Il avait Ned Land, le roi des harponneurs.

   El Abraham Lincoln no carecía, pues, de ningún medio de destrucción. Pero tenía algo mejor aún. Tenía a Ned Land, el rey de los arponeros.

   Ned Land était un Canadien, d'une habileté de main peu commune, et qui ne connaissait pas d'égal dans son périlleux métier. Adresse et sang-froid, audace et ruse, il possédait ces qualités à un degré supérieur, et il fallait être une baleine bien maligne, ou un cachalot singulièrement astucieux pour échapper à son coup de harpon.

   Ned Land era un canadiense de una habilidad manual poco común, que no tenía igual en su peligroso oficio. Poseía en grado superlativo las cualidades de la destreza y de la sangre fría, de la audacia y de la astucia. Muy maligna tenía que ser una ballena, singularmente astuto debía ser un cachalote, para que pudiera escapar a su golpe de arpón.

   Ned Land avait environ quarante ans. C'était un homme de grande taille — plus de six pieds anglais — vigoureusement bâti, l'air grave, peu communicatif, violent parfois, et très rageur quand on le contrariait. Sa personne provoquait l'attention, et surtout la puissance de son regard qui accentuait singulièrement sa physionomie.

   Ned Land tenía unos cuarenta años de edad. Era un hombre de elevada estatura -más de seis pies ingleses y de robusta complexión. Tenía un aspecto grave y era poco comunicativo, violento a veces y muy colérico cuando se le contrariaba. Su persona llamaba la atención, y sobre todo el poder de su mirada que daba un singular acento a su fisonomía.

   Je crois que le commandant Farragut avait sagement fait d'engager cet homme à son bord. Il valait tout l'équipage, à lui seul, pour l'oeil et le bras. Je ne saurais le mieux comparer qu'à un télescope puissant qui serait en même temps un canon toujours prêt à partir.

   Creo que el comandante Farragut había estado bien inspirado al contratar a este hombre que, por su ojo y su brazo, valía por toda la tripulación. No puedo hallarle mejor comparación que la de un potente telescopio que fuese a la vez un cañón.

   Qui dit Canadien, dit Français, et, si peu communicatif que fût Ned Land, je dois avouer qu'il se prit d'une certaine affection pour moi. Ma nationalité l'attirait sans doute. C'était une occasion pour lui de parler, et pour moi d'entendre cette vieille langue de Rabelais qui est encore en usage dans quelques provinces canadiennes. La famille du harponneur était originaire de Québec, et formait déjà un tribu de hardis pêcheurs à l'époque où cette ville appartenait à la France.

   Quien dice canadiense dice francés y, por poco comunicativo que fuese Ned Land, debo decir que me cobró cierto afecto, atraído quizá por mi nacionalidad. Era para él una ocasión de hablar, como lo era para mí de oír, esa vieja lengua de Rabelais todavía en uso en algunas provincias canadienses. La familia del arponero era originaria de Quebec, y formaba ya una tribu de audaces pescadores en la época en que esa tierra pertenecía a Francia.

   Peu à peu, Ned prit goût à causer. et j'aimais à entendre le récit de ses aventures dans les mers polaires. Il racontait ses pêches et ses combats avec une grande poésie naturelle. Son récit prenait une forme épique, et je croyais écouter quelque Homère canadien, chantant l'Iliade des régions hyperboréennes.

   Poco a poco, Ned se aficionó a hablar conmigo. A mí me gustaba mucho oírle el relato de sus aventuras en los mares polares. Narraba sus lances de pesca y sus combates, con una gran poesía natural. Sus relatos tomaban una forma épica que me llevaba a creer estar oyendo a un Homero canadiense cantando la Ilíada de las regiones hiperbóreas.

   Je dépeins maintenant ce hardi compagnon, tel que je le connais actuellement. C'est que nous sommes devenus de vieux amis, unis de cette inaltérable amitié qui naît et se cimente dans les plus effrayantes conjonctures! Ah! brave Ned! je ne demande qu'à vivre cent ans encore, pour me souvenir plus longtemps de toi!

   Describo ahora a este audaz compañero tal como lo conozco actualmente. Somos ahora viejos amigos, unidos por la inalterable amistad que nace y se cimenta en las pruebas difíciles. ¡Ah, mi buen Ned! Sólo pido vivir aún cien años más para poder recordarte más tiempo.

   Et maintenant, quelle était l'opinion de Ned Land sur la question du monstre marin? Je dois avouer qu'il ne croyait guère à la licorne, et que, seul à bord, il ne partageait pas la conviction générale. Il évitait même de traiter ce sujet, sur lequel je crus devoir l'entreprendre un jour.

   ¿Cual era la opinión de Ned Land sobre la cuestión del monstruo marino? Debo confesar que no creía apenas en el unicornio y que era el único a bordo que no compartía la convicción general. Incluso evitaba hablar del tema, sobre el que le abordé un día.

   Par une magnifique soirée du 30 juillet, c'est-à-dire trois semaines après notre départ, la frégate se trouvait à la hauteur du cap Blanc, à trente milles sous le vent des côtes patagonnes. Nous avions dépassé le tropique du Capricorne, et le détroit de Magellan s'ouvrait à moins de sept cent milles dans le sud. Avant huit jours, l'Abraham-Lincoln sillonnerait les flots du Pacifique.

   Era el 30 de julio, es decir, a las tres semanas de nuestra partida, y la fragata se hallaba a la altura del cabo Blanco, a treinta millas a sotavento de las costas de la Patagonia. Habíamos pasado ya el trópico de Capricornio, y el estrecho de Magallanes se abría a menos de setecientas millas al sur. Antes de ocho días, el Abraham Lincoln se hallaría en aguas del Pacífico.

   Assis sur la dunette, Ned Land et moi, nous causions de choses et d'autres, regardant cette mystérieuse mer dont les profondeurs sont restées jusqu'ici inaccessibles aux regards de l'homme. J'amenai tout naturellement la conversation sur la licorne géante, et j'examinai les diverses chances de succès ou d'insuccès de notre expédition. Puis, voyant que Ned me laissait parler sans trop rien dire, je le poussai plus directement.

   Hacía una magnífica tarde, y sentados en la toldilla hablábamos Ned Land y yo de unas y otras cosas, mientras mirábamos el mar misterioso cuyas profundidades han permanecido hasta aquí inaccesibles a los ojos del hombre. Llevé naturalmente la conversación al unicornio gigantesco, y me extendí en consideraciones sobre las diversas posibilidades de éxito o de fracaso de nuestra expedición. Luego, al ver que Ned Land me dejaba hablar, le ataqué más directamente.

   «Comment, Ned, lui demandai-je, comment pouvez-vous ne pas être convaincu de l'existence du cétacé que nous poursuivons? Avez-vous donc des raisons particulières de vous montrer si incrédule?»

   -¿Cómo es posible, Ned, que no esté usted convencido de la existencia del cetáceo que perseguimos? -¿Tiene usted razones particulares para mostrarse tan incrédulo?

   Le harponneur me regarda pendant quelques instants avant de répondre, frappa de sa main son large front par un geste qui lui était habituel, ferma les yeux comme pour se recueillir, et dit enfin:

   El arponero me miró durante algunos instantes antes de responder, se golpeó la frente con la mano, con un gesto que le era habitual, cerró los ojos como para recogerse y dijo, al fin:

   «Peut-être bien, monsieur Aronnax.

   -Quizá, señor Aronnax.

   — Cependant, Ned, vous, un baleinier de profession, vous qui êtes familiarisé avec les grands mammifères marins, vous dont l'imagination doit aisément accepter l'hypothèse de cétacés énormes, vous devriez être le dernier à douter en de pareilles circonstances!

   -Sin embargo, Ned, usted que es un ballenero profesional, usted que está familiarizado con los grandes mamíferos marinos, usted cuya imaginación debería aceptar fácilmente la hipótesis de cetáceos enormes, parece el menos indicado… debería ser usted el último en dudar, en semejantes circunstancias.

   — C'est ce qui vous trompe, monsieur le professeur, répondit Ned. Que le vulgaire croie à des comètes extraordinaires qui traversent l'espace, ou à l'existence de monstres antédiluviens qui peuplent l'intérieur du globe, passe encore, mais ni l'astronome, ni le géologue n'admettent de telles chimères. De même, le baleinier. J'ai poursuivi beaucoup de cétacés, j'en ai harponné un grand nombre, j'en ai tué plusieurs, mais si puissants et si bien armés qu'ils fussent, ni leurs queues, ni leurs défenses n'auraient pu entamer les plaques de tôle d'un steamer.

   -Se equivoca, señor profesor. Pase aún que el vulgo crea en cometas extraordinarios que atraviesan el espacio o en la existencia de monstruos antediluvianos que habitan el interior del globo, pero ni el astrónomo ni el geólogo admitirán tales quimeras. Lo mismo ocurre con el ballenero. He perseguido a muchos cetáceos, he arponeado un buen número de ellos, he matado a muchos, pero por potentes y bien armados que estuviesen, ni sus colas ni sus defensas hubieran podido abrir las planchas metálicas de un vapor.

   — Cependant, Ned, on cite des bâtiments que la dent du narwal a traversés de part en part.

   -Y, sin embargo, Ned, se ha demostrado que el narval ha conseguido atravesar con su diente barcos de parte a parte.

   — Des navires en bois, c'est possible, répondit le Canadien, et encore, je ne les ai jamais vus. Donc, jusqu'à preuve contraire, je nie que baleines, cachalots ou licornes puissent produire un pareil effet.

   -Barcos de madera, quizá, es posible, aunque yo no lo he visto nunca. Así que hasta no tener prueba de lo contrario, yo niego que las ballenas, los cachalotes o los unicornios puedan producir tal efecto.

   — Écoutez-moi, Ned...

   -Escuche, Ned…

   — Non, monsieur le professeur, non. Tout ce que vous voudrez excepté cela. Un poulpe gigantesque, peut-être?...

   -No, señor profesor, no. Todo lo que usted quiera, excepto eso. ¿Quizá un pulpo gigantesco?

   — Encore moins, Ned. Le poulpe n'est qu'un mollusque, et ce nom même indique le peu de consistance de ses chairs. Eût-il cinq cents pieds de longueur, le poulpe, qui n'appartient point à l'embranchement des vertébrés, est tout à fait inoffensif pour des navires tels que le Scotia ou l'Abraham-Lincoln. Il faut donc rejeter au rang des fables les prouesses des Krakens ou autres monstres de cette espèce.

   -Aún menos, Ned. El pulpo no es más que un molusco, y ya esto indica la escasa consistencia de sus carnes. Aunque tuviese quinientos pies de longitud, el pulpo, que no pertenece a la rama de los vertebrados, es completamente inofensivo para barcos tales como el Scotia o el Abraham Lincoln. Hay que relegar al mundo de la fábula las proezas de los krakens u otros monstruos de esa especie.

   — Alors, monsieur le naturaliste, reprit Ned Land d'un ton assez narquois, vous persistez à admettre l'existence d'un énorme cétacé...?

   -Entonces, señor naturalista preguntó Ned Land con un tono irónico-, ¿persiste usted en admitir la existencia de un enorme cetáceo?

   — Oui, Ned, je vous le répète avec une conviction qui s'appuie sur la logique des faits. Je crois à l'existence d'un mammifère, puissamment organisé, appartenant à l'embranchement des vertébrés, comme les baleines, les cachalots ou les dauphins, et muni d'une défense cornée dont la force de pénétration est extrême.

   -Sí, Ned, se lo repito con una convicción que se apoya en la lógica de los hechos. Creo en la existencia de un mamífero, poderosamente organizado, perteneciente a la rama de los vertebrados, como las ballenas, los cachalotes o los delfines, y provisto de una defensa córnea con una extraordinaria fuerza de penetración.

   — Hum! fit le harponneur, en secouant la tête de l'air d'un homme qui ne veut pas se laisser convaincre.

   -¡Hum! -dijo el arponero, moviendo la cabeza con el ademán de un hombre que no quiere dejarse convencer.

   — Remarquez, mon digne Canadien, repris-je, que si un tel animal existe, s'il habite les profondeurs de l'Océan, s'il fréquente les couches liquides situées à quelques milles au-dessous de la surface des eaux, il possède nécessairement un organisme dont la solidité défie toute comparaison.

   -Y observe, mi buen canadiense, que si tal animal existe, si habita las profundidades del océano, si frecuenta las capas líquidas situadas a algunas millas por debajo de la superficie de las aguas, tiene que poseer necesariamente un organismo cuya solidez desafíe a toda comparación.

   — Et pourquoi cet organisme si puissant? demanda Ned.

   -Y ¿por qué un organismo tan poderoso? -preguntó Ned.

   — Parce qu'il faut une force incalculable pour se maintenir dans les couches profondes et résister à leur pression.

   -Porque hace falta una fuerza incalculable para mantenerse en las capas profundas y resistir a su presión.

   — Vraiment? dit Ned qui me regardait en clignant de l'oeil.

   -¿De veras? -dijo Ned, que me miraba con los ojos entrecerrados.

   — Vraiment, et quelques chiffres vous le prouveront sans peine.

   -Ciertamente, y algunas cifras se lo probarán fácilmente.

   — Oh! les chiffres! répliqua Ned. On fait ce qu'on veut avec les chiffres!

   -¡Oh, las cifras! -replicó Ned-. Se hace lo que se quiere con las cifras.

   — En affaires, Ned, mais non en mathématiques. Écoutez-moi. Admettons que la pression d'une atmosphère soit représentée par la pression d'une colonne d'eau haute de trente-deux pieds. En réalité, la colonne d'eau serait d'une moindre hauteur, puisqu'il s'agit de l'eau de mer dont la densité est supérieure à celle de l'eau douce. Eh bien, quand vous plongez, Ned, autant de fois trente-deux pieds d'eau au-dessus de vous, autant de fois votre corps supporte une pression égale à celle de l'atmosphère, c'est-à-dire de kilogrammes par chaque centimètre carré de sa surface. Il suit de là qu'à trois cent vingt pieds cette pression est de dix atmosphères, de cent atmosphères à trois mille deux cents pieds, et de mille atmosphères à trente-deux mille pieds, soit deux lieues et demie environ. Ce qui équivaut à dire que si vous pouviez atteindre cette profondeur dans l'Océan, chaque centimètre carré de la surface de votre corps subirait une pression de mille kilogrammes. Or, mon brave Ned, savez-vous ce que vous avez de centimètres carrés en surface?

   -En los negocios, sí, Ned, pero no en matemáticas. Escuche. Admitamos que la presión de una atmósfera esté representada por la presión de una columna de agua de treinta y dos pies de altura. En realidad, la altura de la columna sería menor, puesto que se trata de agua de mar cuya densidad es superior a la del agua dulce. Pues bien, cuando usted se sumerge, Ned, tantas veces cuantas descienda treinta y dos pies soportará su cuerpo una presión igual a la de la atmósfera, es decir, de kilogramos por cada centímetro cuadrado de su superficie. De ello se sigue que a trescientos veinte pies esa presión será de diez atmósferas, de cien atmósferas a tres mil doscientos pies, y de mil atmósferas, a treinta y dos mil pies, es decir a unas dos leguas y media. Lo que equivale a decir que si pudiera usted alcanzar esa profundidad en el océano, cada centímetro cuadrado de la superficie de su cuerpo sufriría una presión de mil kilogramos. ¿Y sabe usted, mi buen Ned, cuántos centímetros cuadrados tiene usted en superficie?

   — Je ne m'en doute pas, monsieur Aronnax.

   -Lo ignoro por completo, señor Aronnax.

   — Environ dix-sept mille.

   -Unos diecisiete mil, aproximadamente.

   — Tant que cela?

   ¿Tantos? ¿De veras?

   — Et comme en réalité la pression atmosphérique est un peu supérieure au poids d'un kilogramme par centimètre carré, vos dix-sept mille centimètres carrés supportent en ce moment une pression de dix-sept mille cinq cent soixante-huit kilogrammes.

   -Y, como, en realidad, la presión atmosférica es un poco superior al peso de un kilogramo por centímetro cuadrado, sus diecisiete mil centímetros cuadrados están soportando ahora una presión de diecisiete mil quinientos sesenta y ocho kilogramos.

   — Sans que je m'en aperçoive?

   -¿Sin que yo me dé cuenta?

   — Sans que vous vous en aperceviez. Et si vous n'êtes pas écrasé par une telle pression, c'est que l'air pénètre à l'intérieur de votre corps avec une pression égale. De là un équilibre parfait entre la poussée intérieure et la poussée extérieure, qui se neutralisent, ce qui vous permet de les supporter sans peine. Mais dans l'eau, c'est autre chose.

   -Sin que se dé cuenta. Si tal presión no le aplasta a usted es porque el aire penetra en el interior de su cuerpo con una presión igual. De ahí un equilibrio perfecto entre las presiones interior y exterior, que se neutralizan, lo que le permite soportarla sin esfuerzo. Pero en el agua es otra cosa.

   — Oui, je comprends, répondit Ned, devenu plus attentif, parce que l'eau m'entoure et ne me pénètre pas.

   -Sí, lo comprendo -respondió Ned, que se mostraba más atento-. Porque el agua me rodea y no me penetra.

   — Précisément, Ned. Ainsi donc, à trente-deux pieds au-dessous de la surface de la mer, vous subiriez une pression de dix-sept mille cinq cent soixante-huit kilogrammes; à trois cent vingt pieds, dix fois cette pression, soit cent soixante-quinze mille six cent quatre-vingt kilogrammes; à trois mille deux cents pieds, cent fois cette pression, soit dix-sept cent cinquante-six mille huit cent kilogrammes; à trente-deux mille pieds, enfin, mille fois cette pression, soit dix-sept millions cinq cent soixante-huit mille kilogrammes; c'est-à-dire que vous seriez aplati comme si l'on vous retirait des plateaux d'une machine hydraulique!

   -Exactamente, Ned. Así, pues, a treinta y dos pies por debajo de la superficie del mar sufriría usted una presión de diecisiete mil quinientos sesenta y ocho kilogramos; a trescientos veinte pies, diez veces esa presión, o sea, ciento setenta y cinco mil seiscientos ochenta kilogramos; a tres mil doscientos pies, cien veces esa presión, es decir, un millón setecientos cincuenta y seis mil ochocientos kilogramos; y a treinta y dos mil pies, mil veces esa presión, o sea diecisiete millones quinientos sesenta y ocho mil kilogramos. En una palabra, que se quedaría usted planchado como si le sacaran de una apisonadora.

   — Diable! fit Ned.

   -¡Diantre! -exclamó Ned.

   — Eh bien, mon digne harponneur, si des vertébrés, longs de plusieurs centaines de mètres et gros à proportion, se maintiennent à de pareilles profondeurs, eux dont la surface est représentée par des millions de centimètres carrés, c'est par milliards de kilogrammes qu'il faut estimer la poussée qu'ils subissent. Calculez alors quelle doit être la résistance de leur charpente osseuse et la puissance de leur organisme pour résister à de telles pressions!

   -Pues bien, mi buen Ned, si hay vertebrados de varios centenares de metros de longitud y de un volumen proporcional que se mantienen a semejantes profundidades, con una superficie de millones de centímetros cuadrados, calcule la presión que resisten en miles de millones de kilogramos. Calcule usted cuál debe ser la resistencia de su armazón ósea y la potencia de su organismo para resistir a tales presiones.

   — Il faut, répondit Ned Land, qu'ils soient fabriqués en plaques de tôle de huit pouces, comme les frégates cuirassées.

   -Deben estar fabricados -respondió Ned Land- con planchas de hierro de ocho pulgadas, como las fragatas acorazadas.

   — Comme vous dites, Ned, et songez alors aux ravages que peut produire une pareille masse lancée avec la vitesse d'un express contre la coque d'un navire.

   -Como usted dice, Ned. Piense ahora en los desastres que puede producir una masa semejante lanzada con la velocidad de un expreso contra el casco de un buque.

   — Oui... en effet... peut-être, répondit le Canadien, ébranlé par ces chiffres, mais qui ne voulait pas se rendre.

   -Sí… en efecto… tal vez -respondió el canadiense, turbado por esas cifras, pero sin querer rendirse.

   — Eh bien, vous ai-je convaincu?

   -Pues bien, ¿le he convencido?

   — Vous m'avez convaincu d'une chose, monsieur le naturaliste, c'est que si de tels animaux existent au fond des mers, il faut nécessairement qu'ils soient aussi forts que vous le dites.

   -Me ha convencido de una cosa, señor naturalista, y es de que si tales animales existen en el fondo de los mares deben necesariamente ser tan fuertes como dice usted.

   — Mais s'ils n'existent pas, entêté harponneur, comment expliquez-vous l'accident arrivé au Scotia?

   -Pero si no existen, testarudo arponero, ¿cómo se explica usted el accidente que le ocurrió al Scotia?

   — C'est peut-être..., dit Ned hésitant.

   -Pues… porque… -dijo Ned, titubeando.

   — Allez donc!

   -¡Continúe!

   — Parce que... ça n'est pas vrai!» répondit le Canadien, en reproduisant sans le savoir une célèbre réponse d'Arago.

   -Pues, ¡porque… eso no es verdad! -respondió el canadiense, repitiendo, sin saberlo, una célebre respuesta de Arago.

   Mais cette réponse prouvait l'obstination du harponneur et pas autre chose. Ce jour-là, je ne le poussai pas davantage. L'accident du Scotia n'était pas niable. Le trou existait si bien qu'il avait fallu le boucher, et je ne pense pas que l'existence du trou puisse se démontrer plus catégoriquement. Or, ce trou ne s'était pas fait tout seul, et puisqu'il n'avait pas été produit par des roches sous-marines ou des engins sous-marins, il était nécessairement dû à l'outil perforant d'un animal.

   Pero esta respuesta probaba la obstinación del arponero y sólo eso. Aquel día no le acosé más. El accidente del Scotia no era negable. El agujero existía, y había habido que colmarlo. No creo yo que la existencia de un agujero pueda hallar demostración más categórica. Ahora bien, ese agujero no se había hecho solo, y puesto que no había sido producido por rocas submarinas o artefactos submarinos, necesariamente tenía que haberlo hecho el instrumento perforante de un animal.

   Or, suivant moi, et toutes les raisons précédemment déduites, cet animal appartenait à l'embranchement des vertébrés, à la classe des mammifères, au groupe des pisciformes, et finalement à l'ordre des cétacés. Quant à la famille dans laquelle il prenait rang, baleine, cachalot ou dauphin, quant au genre dont il faisait partie, quant à l'espèce dans laquelle il convenait de le ranger, c'était une question à élucider ultérieurement. Pour la résoudre. il fallait disséquer ce monstre inconnu, pour le disséquer le prendre, pour le prendre le harponner — ce qui était l'affaire de Ned Land — pour le harponner le voir ce qui était l'affaire de l'équipage — et pour le voir le rencontrer — ce qui était l'affaire du hasard.

   Y en mi opinión, y por todas las razones precedentemente expuestas, ese animal pertenecía a la rama de los vertebrados, a la clase de los mamíferos, al grupo de los pisciformes, y, finalmente, al orden de los cetáceos. En cuanto a la familia en que se inscribiera, ballena, cachalote o delfín, en cuanto al género del que formara parte, en cuanto a la especie a que hubiera que adscribirle, era una cuestión a elucidar posteriormente. Para resolverla había que disecar a ese monstruo desconocido; para disecarlo, necesario era apoderarse de él; para apoderarse de él, había que arponearlo (lo que competía a Ned Land); para arponearlo, había que verlo (lo que correspondía a la tripulación), y para verlo había que encontrarlo (lo que incumbía al azar).